Yennayer est la seule fête non musulmane commune à tous les
peuples d’Afrique du Nord. Dans chaque région, elle donne lieu à des festivités
diverses et à des repas familiaux.
Yennayer est la fête célébrant le passage au nouvel an ajmi par
les Imazighen. Ce jour correspond au 13 janvier. Le 13 janvier du calendrier du
calendrier grégorien actuel (instauré par le pape Grégoire XIII en 1582)
correspondant au 1er Janvier du calendrier Julien (institué en 45
av. J.-C. par l’Empereur Jules César).
Les Imazighen avaient donc leur propre calendrier dit Ajmi
bien
ancien, basé à la fois sur les changements de saisons et les différents cycles
de la végétation qui déterminent les moments cruciaux à l’agriculture, et sur
les positionnements des astres comme la lune, le soleil et les différentes
constellations.Grand sphinx de granit réinscrit au nom de Sheshonq Ier - Trouvé à Tanis, aujourd'hui au musée du Louvre |
L’histoire des Berbères remonte à 10 000 ans avant Jésus
Christ. Ce n’est pourtant qu’au temps de l’Egypte ancienne que sera fixé l’an
zéro du calendrier berbère. Il correspond à la date où le roi Chacnaq 1er
(Sheshonq) fût intronisé pharaon d’Egypte. Ce roi berbère avait réussi à
unifier l’Egypte pour ensuite envahir la Palestine. On dit de lui qu’il
s’empara des trésors du temple de Salomon à Jérusalem. Cette date est
mentionnée dans la Bible et constitue par là-même, la première date de
l’histoire berbère sur un support écrit.
Les travaux des paléontologues et historiens démontrent sans
équivoque que les Berbères étaient présents en Egypte depuis sa constitution.
Nous retrouverons ensuite des inscriptions libyques sur la pierre de rosette.
Des tifinaghs récents qui remontent au moins au Ve siècle avant notre ère, date
du mausolée d’Abelessa. Les Imazighen Mashaouash, Libous orientaux de
Cyrénaïque étaient en contact direct avec les l’Egypte ancienne. En 1200 avant
J.C. la civilisation libyque avait même bouleversé l’équilibre de la
Méditerranée orientale en envahissant l’Egypte.
A la fin de la XXIème dynastie égyptienne, Sheshonk
(Chachnaq 1er), grand chef militaire des Mashaouash, obtint du Pharaon Siamon,
dont l’armée était en grande partie composée d’Imazighen, l’autorisation
d’organiser un culte funéraire pour son père Namart, un privilège exceptionnel.
A la mort de Psossenes II en 950 av. JC qui avait succédé à Siamon, Sheshonk
s’attribua la dignité royale et fonda la XXIIème Dynastie qu’il légitima en
mariant son fils, Osorkon, la fille de Psoussens II, la princesse Makare et
installa un autre de ses fils comme grand prêtre d’Amon Thbes. Sheshonk établit
sa capital Boubastis, installa les hommes de sa tribu dans des terres du delta
du Nil et leur constitua des fiefs. Une nouvelle féodalité prit pied en Egypte.
L’an zéro amazigh se réfère donc à cette date historique de 950 av. JC ou
Sheshonk fut monté sur le trône et fonda la XXIIème Dynastie.
Le jour de l’an le 12 yennayer, les Imazighen fêtent la
nouvelle année, ce qui correspond donc au 1er jour du mois Yennayer. Pour les
Imazighen, Yennayer est d’abord une porte qui s’ouvre sur le nouvel an et
appelée ’tabburt useggwass’ (la porte de l’année). Sa célébration s’explique
par l’importance accordée aux rites et aux superstitions de l’époque dont
certaines subsistent encore de nos jours. La période en question attire
particulièrement l’attention car la saison correspond à l’approche de la
rupture des provisions gardées pour l’hiver. Il convient donc de renouveler ses
forces spirituelles en faisant appel aux rites. À cette époque de l’année, le
rite doit symboliser la richesse. Ainsi, pour que la nouvelle année entamée
soit prospère et la terre plus fertile, il convient de se purifier et de
nettoyer les lieux.
On obéit également aux lois rituelles telles que le
sacrifice d’un animal (Asfel) sur le seuil de l’année, comme on le fait encore
de nos jours sur les fondations d’une nouvelle bâtisse. Le rituel asfel
symbolise l’expulsion des forces et des esprits maléfiques pour faire place aux
esprits bénéfiques qui vont nous soutenir l’année durant. Si les moyens le
permettent, seront sacrifiés autant de bêtes qu’il y a de membres de famille.
La tradition a retenu le sacrifice d’un coq par homme, une poule par femme et
les deux ensembles pour les femmes enceintes afin de ne pas oublier le futur
bébé. A défaut de viande, chaque membre de famille sera représenté par un œuf
surmontant une couronne de pâtes.
Le dîner ce jour-là sera servi tard et se doit d’être
copieux, ce qui aux yeux des Imazighens augurera une année abondante. La viande
de l’animal sacrifié y sera servie conformément au rite. Certains ne pouvant se
permettre un tel sacrifice, servent de la viande sèche, kaddid chayah, gardée
pour de pareilles occasions : un Yennayer sans la viande fût-elle sèche n’en
était pas un ! Lors du dîner, une cérémonie est prononcée afin de préserver les
absents et de faire que l’année soit bonne. Les absents ne seront pas les
oubliés du repas : des cuillères disposées par la mère symbolisent leur
présence et une proportion symbolique leur sera laissée dans le plat collectif,
sensé rassembler toutes les forces de la famille.
Après le repas il convient de vérifier si tout le monde a
mangé à sa fin. C’est la maitresse des lieux internes (la grand-mère ou la
mère) qui pose la question aux enfants pour savoir s’ils ont mangé à leur faim.
La maitresse des lieux n’oublie pas non plus les proches ou les voisins,
lesquelles lui rendent également des aliments différents : il n’est pas de
coutume de laisser balader des ustensiles vides le jour de laâwacher (jours
bénis).
La fête garde de sa saveur pendant les quelques jours qui
suivent l’événement. on prépare lesfenj (des beignets), tighrifin (crêpes), les
Banadhej (avec de la viande hachée et des œufs) et tout autre plats et gâteaux
rappelant une saveur rare fût-elle importée ( zest de citron, cannelle, vanille
…).
Seront également au rendez-vous les fruits secs amassés ou
achetés le reste de l’année, figues sèches, amandes, noisettes, dattes, etc.
Dans certaines régions, de la Tunisie ou l’Algérie, certains
s’abstiennent de manger des aliments épicés ou amers par peur de présager une
année du même gout. Le repas de Yennayer est conditionné par les récoltes selon
les régions mais aussi par les moyens des uns et des autres. Les aliments
servis vont symboliser la richesse, la fertilité ou l’abondance. Il est ainsi
des borghol (bouillie de blé) et des halelem aux debabech (fèves et poids-chiches)
ou le cœur du palmier !!! pas
question de rater le repas de bénédiction qu’est celui de Yennayer. Le bon
présage de Yennayer fait aussi que l’on lui associe d’autres événements
familiaux comme la première coupe de cheveux du dernier né ou les mariages (Pour
ceux qui ne sont pas nombreux qui ont choisi la saison de l’hiver pour cet heureux événement).
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